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Priorité à la solidarité active
26 avril 2017
Turquie : priorité à la solidarité active
Dans leur déclaration commune du 23 novembre 2016, les huit organisations syndicales françaises, CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT, FO, FSU, Solidaires et UNSA, attiraient l’attention de leurs adhérents et de l’opinion publique sur la situation en Turquie, marquée par de graves violations des droits fondamentaux et des libertés syndicales, sous un régime d’état d’urgence systématiquement maintenu depuis la tentative du coup d’Etat déjouée du 15 juillet 2016.
C’est dans ces conditions que le pouvoir a entrepris la préparation et l’organisation du référendum qui a eu lieu dimanche dernier. 55 millions d’électeurs ont été appelés à dire « oui » ou « non » à dix-huit articles constitutionnels rédigés sans débat public, et dont l’objectif est de remplacer le régime parlementaire par un régime présidentiel sans séparation des pouvoirs.
En Turquie, les confédérations syndicales amies DISK et KESK ont appelé à voter « non ».
La délégation intersyndicale française qui s’est rendue à Istanbul et Ankara les 21 et 22 mars derniers, a eu l’occasion – entre autres – de constater que la campagne autour du référendum était inéquitable. Tous les moyens de l’administration, centrale et locale, ont été mis à la disposition des partisans de « oui », tandis que la répression s’accentuait à l’encontre de l’opposition et en particulier des militants syndicaux :
- Une dizaine de députés et plus de 5000 militants du deuxième parti d’opposition (HDP) ont été mis en prison ;
- Les militants syndicaux, politiques ou associatifs, partisans du « non », ont été censurés, harcelés par les forces de l’ordre, mis en garde à vue par des magistrats partiaux, leurs manifestations interdites ou réprimées.
Alors que le dépouillement continuait, le Haut conseil électoral a décidé d’accepter les bulletins et les enveloppes non estampillés. Le « oui » a été déclaré gagnant avec 51,4 % de voix exprimées, contre 48,6 % pour le « non », soit un écart de 1 379 934 voix.
Les observateurs de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et du Conseil de l’Europe présents sur place ont critiqué de nombreux aspects du scrutin. Les deux partis de l’opposition demandent son annulation, comme les milliers de personnes qui manifestent dans les rues depuis dimanche.
Lundi 18 avril, le conseil des ministres a immédiatement décidé de prolonger de trois mois encore l’état d’urgence sur tout le territoire.
Les organisations syndicales françaises appellent à nouveau le gouvernement français et les instances européennes à agir de manière urgente pour sauvegarder les droits fondamentaux des populations de Turquie en cette période où règnent la confusion et la crainte pour l’avenir.
Des dizaines de milliers de salariés du secteur public licenciés par des décrets politiques arbitraires depuis juillet 2016 sont en train de sombrer dans la précarité totale : ni indemnité de chômage, ni aide sociale, perte de leurs droits à la sécurité sociale. Sans possibilité de travail dans le privé, interdits de voyager à l’étranger, ils se retrouvent socialement marginalisés, stigmatisés. Plongés dans le désespoir, une quarantaine d’entre eux ont mis fin à leurs jours depuis le début de la répression.
L’heure est à la solidarité active avec les travailleurs licenciés et les syndicalistes victimes de la répression, pour leur réintégration et le rétablissement de leurs droits.
Plus que jamais, nous réaffirmons notre soutien à la société civile de Turquie, dans leurs luttes pour la défense des droits sociaux et politiques, pour la sauvegarde des libertés syndicales.
Paris, le 21 avril 2017