Pôle économique de la CGT
Chiffres du chômage 2018 : derrière la soi-disant baisse, la réalité des radiations et de la précarité
7 février 2019
La DARES et Pôle Emploi viennent de publier les chiffres du chômage pour 2018.
Déjà, certains se réjouissent et clament bien fort que la bataille contre le chômage est en train d’être gagnée grâce à la politique mise en place par le gouvernement, pour la satisfaction des plus riches.
Avant de se réjouir il est prudent d’y regarder de façon plus précise.
Effectivement les chiffres de Pôle Emploi indiquent que le nombre de chômeurs catégorie A qui s’établissait à 3 469 200 chômeurs en 2017 passe à 3 418 600 en 2018 soit -50 600 personnes et -1,45 %. A cette vitesse, on peut espérer l’éradication du chômage dans 62 ans. Cela tempère de manière importante la satisfaction de ceux qui crient victoire.
Il convient aussi de comprendre les raisons de ces résultats : sont-ils obtenus par la reprise du travail des chômeurs ou pour d’autres raisons ?
L’étude de Pôle Emploi indique que : le nombre moyen des sorties pour les catégories A-B-C au 4ème trimestre 2018 est due pour 51,9% des cas :
- – à une cessation d’inscription pour défaut d’actualisation pour 227 400 personnes soit 43,6% + 5,1% en 1 an ;
- – à une radiation administrative pour 43 500 personnes soit 8,3% donc- 5,2% en un an (chiffres données avant la mise de la nouvelle échelle de sanctions au 01/01/2019)
- – Seules 107 700 personnes sont sorties pour reprise de travail soit 20,6%, 1 personne sur 5. Il y a donc encore un long chemin pour que la principale raison de sortie du chômage, soit la reprise du travail. Il est par ailleurs utile de rappeler qu’avec les mesures pour contrôler de manière plus que tatillonne les chômeurs misent en place depuis le 1er janvier 2019 et la volonté de leur imposer des contraintes inacceptables sous menace de ne plus les indemniser en cas de refus, il est raisonnable de penser que les motifs de sortie de chômage majoritaires vont encore se renforcer.
Il convient aussi d’étudier l’évolution des autres catégories.
Pour la catégorie B : Personnes ayant exercé une activité réduite de 78 heures maximum par mois, tenue d’accomplir des actes positifs de recherche d’emploi : le nombre de personnes concernées passe de 747 400 en 2017 à 750 200 soit +2 800 et 0,4%.
Pour la catégorie C: Personne ayant exercé une activité réduite de plus de 78 heures par mois, tenue d’accomplir des actes positifs de recherche d’emploi : le nombre de personnes concernées passe de 1 404 300 à 1 436 200 soit +31 900 +2,3%.
Les 2 catégories d’activité réduite passent donc de 2 151 800 à 2 186 400 soit +34 600 personnes +1,6%.
Il est à noter que c’est encore un système discriminant pour les femmes qui représentent 56,7% du chômage des catégories B C, avec l’impact que cela a sur la faiblesse des indemnisations, les faibles salaires attachés au travail à temps partiel, les déroulements de carrière, l’incidence sur l’ouverture des droits et le montant des retraites.
Un autre élément, à prendre en compte, est que pour les catégories A, B et C, le chômage longue durée augmente passant de 44,9% en 2017 à 47,2% en 2018. Près d’un chômeur sur 2 l’est depuis plus d’un an. De plus « l’ancienneté moyenne » au chômage passe de 593 à 620 jours (1,70 an) +27 jours.
De ce fait, le nombre de chômeurs catégories A B et C ne baisse plus que de 0,3% sur un an, au lieu des 1,45% de la catégorie A.
Cette augmentation du nombre de chômeur ayant une activité réduite renvoie au débat social qui traverse le pays. A quoi servirait une baisse du chômage si c’est pour qu’elle se traduise par une augmentation de la misère. Depuis des années, les libéraux nous expliquent qu’il vaut mieux un petit boulot, mal payé, sans garanties sociales, que pas de travail du tout. Or, aujourd’hui le débat remet en cause cette théorie et montre l’exigence naturelle de pouvoir vivre décemment de son travail.
Les moyens existent. Par exemple le montant des dividendes versé par les entreprises du CAC 40 en 2018 pour l’exercice 2017 s’élève 57,4 milliards d’euros la rémunération moyenne des patrons du CAC 40 atteint 5 Millions d’€ par an, soit plus de 280 années de SMIC, en augmentation de 14%, la plus forte des 10 dernières années. Il est plus que jamais urgent de casser cette spirale infernale de la financiarisation, qui montre une fois de plus qu’elle est inefficace économiquement, inacceptable socialement.
Le 5 février sera l’occasion de dire STOP et qu’il est temps de réorienter l’argent pour la satisfaction des besoins des populations dans le cadre d’un développement humain durable.