L’an pire contre-attaque

9 décembre 2024

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Voyez comme nous sommes ingrats. Nous n’avons rien compris au génie politique d’Emmanuel Macron. Rempli de bienveillance et d’humilité, il se démène pour inventer son « nouveau monde ». Et nous, ingrats que nous sommes, nous nous contentons de le contrarier.
L’objectif de la réforme des retraites ? Une œuvre de pur altruisme, destinée à nous épanouir plus longtemps au travail. Car, bien sûr, cela n’a rien à voir avec le lobbying des fonds de pension privés ni avec une quelconque volonté de nous broyer jusqu’au dernier souffle.
Quant aux coupes dans les dépenses sociales, elles regorgent de générosité cachée : elles permettent à chacun de découvrir la douce poésie d’un frigo vide. Après tout, c’est excellent pour garder la ligne, non ? Et la démolition des services publics ? Une chance inouïe pour le peuple d’apprendre à s’autogérer, sans professeurs ni médecins. À quoi bon l’éducation quand l’électeur moderne se décide après deux vidéos TikTok ?

Chaos debout
Mais c’est dans l’art de la grande manœuvre politique que notre Président excelle. Dissoudre l’Assemblée nationale pour mieux ouvrir les portes du pouvoir à l’extrême droite : un coup de maître ! Là encore, pauvres imbéciles que nous sommes, nous avons préféré la démocratie au bruit des bottes fascistes. Face à ce chaos, le président a dépêché le « négociateur » Barnier pour sauver les meubles, mais nos députés l’ont renvoyé à sa retraite bien méritée. Ces élus, toujours pénibles à s’entêter dans l’erreur de calcul : la droite arrive dernière aux législatives, elle a bien le droit de gouverner, non ?

Michel Barnier a pourtant tout essayé, allant jusqu’à quémander auprès de Marine Le Pen. Mais Matignon a oublié un détail crucial : on ne négocie pas avec l’extrême droite. L’histoire l’a démontré maintes fois, mais le « nouveau monde » de Macron préfère écrire un autre récit.

Les Français ne le méritent pas
Quand, le jeudi 5 décembre, Emmanuel Macron réfute toute responsabilité dans le bazar actuel, les commentateurs n’ont toujours rien compris. Après tout, il ne dirige la France que depuis sept ans : à peine le temps de faire exploser la dette avec des mesurettes dispendieuses.

Désormais, Macron appelle à la responsabilité, au calme, à la cohérence… Autant de notions qu’il devrait explorer lui-même. Ces valeurs, il les décline comme des slogans marketing, sans doute pour se persuader qu’il en est l’incarnation. Le chef de l’État claironne que les Français ne le méritent pas. Et comment lui donner tort ?
Les citoyens, eux, veulent mieux : un gouvernement qui défend les travailleurs et préserve l’emploi en France, au lieu de capituler devant la fatalité. Des finances publiques solides grâce à une véritable chasse aux exilés fiscaux et à ceux qui escamotent leurs impôts en toute légalité. Des femmes rémunérées à l’égal des hommes, pour renforcer à la fois la justice sociale et les recettes publiques. Une démocratie capable de relever les défis climatiques et environnementaux, au lieu de les aggraver.

Trouver censure à son pied
Depuis cette censure, une partie de la classe politique tente de rentrer dans le rang présidentiel et se dispute pour des postes et des personnes, mais reste sans programme, sans idéologie. Une partie du PS, par exemple, se dit prête à prendre Matignon, à collaborer avec le centre, les macronistes et une partie de la droite. Autrement dit, avec ceux qui défendent bec et ongles la réforme des retraites, cautionnent les violences policières et soutiennent les lois anti-immigration.

Grâce à Emmanuel Macron, la démocratie se transforme en une séance de brainstorming, définie par le Petit Robert comme « une technique de recherche d’idées originales dans une réunion, chacun émettant ses suggestions spontanément ». Sauf que la démocratie n’est pas une réunion d’agence de pub où même les idées les plus farfelues peuvent accoucher d’un slogan.

Quasi mots doux
Si la vision du président se résume à son propre reflet dans le miroir, il prépare les esprits au pire. Quand il déclare : « Au moment où les guerres en Europe et au Moyen-Orient nous déstabilisent, continuer de préparer nos armées, mais aussi toute la société, et agir pour la paix. Avoir une France plus forte dans une Europe plus forte, plus indépendante et prête à de nouveaux conflits… », il se veut clairvoyant mais ne reste qu’un clown triste. Ursula von der Leyen l’a bien compris en signant l’accord de libre-échange avec le Mercosur contre son avis. Et ce n’est pas la réouverture de Notre-Dame qui redorera son blason. Encore trente longs mois à tenir. Même les marins du Vendée Globe risquent de croiser moins de tempêtes.