Filpac-Cgt
LETTRE FÉDÉRALE N° 28Ne soyons pas les déconfits du déconfinement !
12 mai 2020
Ce lundi 11 mai, ça y est ! Enfin !
C’est la liberté !
Enfin presque…
Pour une grande partie d’entre nous et après plus de cinquante-cinq jours à rester enfermés, confinés, prisonniers chez nous, la liberté de circuler librement est rétablie, même si ce n’est que partiellement et sous certaines conditions…
C’est en tout cas une vraie respiration pour l’ensemble de la population, même si ce déconfinement progressif nous replonge, non sans angoisse, dans « le monde d’avant » que veut nous imposer le gouvernement. En effet, une grande majorité de Français est très inquiète face aux procédures gouvernementales. Cette période de crise sanitaire a démontré l’incompétence et l’inconséquence de l’exécutif ainsi que celles de nos dirigeants d’entreprises. D’ailleurs, ils portent tous la responsabilité pleine et entière du désastre que nous venons de vivre et ils devront répondre, devant le peuple, du nombre catastrophique de décès, ainsi que de la forte accentuation de la crise sociale qui viendra s’ajouter aux autres conséquences de cette crise sanitaire.
Les écoles ouvrent à nouveau leurs portes mais dans un flou particulièrement anxiogène pour les familles comme pour les enseignants et les personnels. Face à cette inquiétude généralisée, le gouvernement n’a qu’une seule réponse : une nouvelle fois il tente de se défausser de sa responsabilité quant aux conséquences de ses décisions, en la reportant sur les élus locaux et les directions d’écoles.
Il en est de même avec les transports collectifs et les commerces. L’essentiel pour Macron et Philippe, c’est la reprise à tout prix de l’activité économique, avec la restauration des marges et des profits, quelles qu’en soient les conséquences sur la santé de celles et ceux qui vont quotidiennement retourner au « chagrin ».
Quant à ces « héros » du quotidien, qui en risquant leur santé et leur vie durant ces derniers cinquante-cinq jours ont assuré la continuité des missions essentielles à la population – services hospitaliers, pompiers, ambulanciers, ramassage des déchets, transport, approvisionnement alimentaire, toutes les industries indispensables, etc. – leur dévouement risque rapidement d’être oublié pour laisser la place aux politiques d’austérité sociale que s’apprêtent à appliquer les serviteurs du capital.
Dans le même temps, le scandale des masques de protection perdure. Insuffisants en nombre pour protéger celles et ceux qui nous protégeaient et soignaient les personnes infectées, voilà que ce bien essentiel à la prévention de toutes et tous devient un objet de commerce, de spéculation et d’enrichissement pour les grandes enseignes de la consommation de masse ! À chacun de se procurer sa protection vitale, la santé exacerbe plus que jamais la convoitise commerciale.
Pendant cette crise, nous avons rêvé au « monde d’après ». Les milieux d’affaires ont préparé le leur : c’est le même qu’avant ! Le même ? Pas tout à fait, car il sera plus injuste, plus cruel, plus inhumain et chacun y va de sa pensée régressive pour le construire. L’institut Montaigne par exemple, reconnu comme think tank du patronat, réclame la suppression des jours fériés, des congés payés, l’explosion du temps de travail, la baisse des salaires, la fin de toute législation sociale et environnementale… Pour la réaction, ces mesures radicales seraient indispensables au redémarrage de l’économie et surtout à la restauration du taux de profit de l’oligarchie capitaliste mondiale.
Anticipant les exigences du Medef, Pénicaud et consorts ont rapidement publié des ordonnances pour préparer le terrain à ces reculs sociaux encore inimaginables il y a quelques mois. Ils sont aidés dans cette sinistre besogne par la centrale syndicale complaisante dont le secrétaire général, Laurent Berger, passe plus de temps à fustiger les travailleurs qui résistent qu’à s’opposer au patronat. Comme il doit être bon pour lui de se rouler ouvertement dans la collaboration de classe, tel un chien dans une charogne, en signant en rase campagne avec Geoffroy Roux de Bézieux la reddition sociale, au nom de l’intérêt suprême du marché. Une sorte de trahison de classe décomplexée…
Dans les prochains jours nous devons nous attendre, au nom de « l’effort de guerre économique », à nous voir imposer des sacrifices sociaux accompagnés par de nouveaux ravages écologiques, en un mot un nouveau départ de la course mondiale mortelle, pour le profit immédiat.
Plus que jamais, il nous revient de rassembler largement les travailleuses et les travailleurs, d’échanger avec eux sur les éléments en notre connaissance et les mensonges d’État, mais surtout de les préparer à la guerre sociale que s’apprête à mener Macron au nom du redémarrage économique.
Dans nos secteurs professionnels, les dossiers ne manquent pas.
Il nous faut en premier lieu rétablir la responsabilité première et unique des patrons dans la sécurité des travailleurs. Pour cela nous devons être attentifs aux mesures qui seront appliquées et aux accords viciés qui seront proposés au nom de l’intérêt « commun » de l’entreprise, phraséologie chère à Berger et consorts pour signer les régressions sociales.
Dans la presse, nul doute que les éditeurs tireront profit de la situation pour accélérer les restructurations qui étaient dans leurs cartons en s’appuyant fortement sur l’aide financière de l’État. Le dossier Presstalis en est l’illustration parfaite (voir la déclaration fédérale ci-après)… tout comme l’avenir de Paris Normandie et de La Marseillaise, pour ne citer que ces deux titres, qui nous éclairera sur la stratégie des éditeurs en ce qui concerne le futur de la presse d’opinion et d’information dans notre pays et son indépendance. La Filpac-Cgt, organisation incontournable de ce secteur, continuera à se battre pour une presse libérée du joug du capital et pour une distribution pluraliste.
Dans l’industrie papetière, l’avenir de Chapelle Darblay ne tient qu’à la détermination des salariés et de leur syndicat CGT. Cette bataille pour la survie de leur usine doit devenir la bataille de cette filière industrielle du futur que représente la branche Papier/Carton. Dans la lutte pour imposer au capital notre « monde d’après », où se retrouve principalement notre conception de l’humain et du développement durable, nous devrons imposer le maintien de cette papeterie innovante, écologique et socialement forte. La fédération restera donc plus que jamais mobilisée aux côtés des PapChap, en interpellant inlassablement les pouvoirs publics, la Commission européenne et l’ensemble de la profession, et ce, par tous les moyens nécessaires.
La Filpac-Cgt et ses adhérents n’ont pas l’intention de devenir les déconfits de ce déconfinement mais, plus que jamais, d’être acteurs et décideurs de leur vie, ainsi que de l’avenir des générations futures et de la planète.